9/10La critique de Kingdoms

/ Critique - écrit par Ryo, le 29/06/2012
Notre verdict : 9/10 - Mon Royaume pour ce jeu ! (Fiche technique)

Tags : kingdom critique hearts tome critiques zombies manga

Souvent, quand on est dans la presse et que l’on teste des jeux, il y a un ordre à respecter. En général, on fait comme dans la restauration rapide : on applique la règle du PEPS (premier entré, premier sorti). Donc là, si je voulais appliquer cette règle-là, je devrais vous parler d’Arcana, de Gears of War ou bien de la dernière POD pour Space Hulk Death Angel que j’ai reçus avant Kingdoms. Or vous l’avez déjà constaté, vous n’êtes pas en train de lire la critique de Gears of War (ou alors on est vraiment à des années-lumière du jeu vidéo…). Et cela pour une raison très simple : quand on a un coup de cœur, les règles du « premier arrivé, premier testé »… et bin ça passe à la trappe ! Pourquoi ? Et bien tout simplement parce que chez Krinein, les coups de cœur, on a envie de vous les faire partager !

Un concept simple...


Le plateau de jeu
Ici donc, pas d’ameritrash, ni de petites figurines, ni de cartes à foison dans ce jeu pourtant édité Edge (et pourtant dieu sait si j’en suis fan). Non, Kingdoms est un jeu très simple (mais comme bien souvent, simple n’est pas synonyme de simpliste) mais au concept fort. Un plateau, quelques tuiles, quelques petits châteaux en plastique et quelques piécettes d’or, c’est tout ce dont vous aurez besoin pour jouer. Le but est simple lui aussi : amasser le plus d’or possible. Pour ce faire, les joueurs ont deux actions possibles. Soit ils piochent au hasard une tuile indiquant une valeur d’or (de +1 à +6) ou bien une valeur de malus d’or (de -1 à -6) et la placent sur l’une des trente cases du plateau de jeu. Soit ils posent un de leurs châteaux sur les cases restantes. Les joueurs gagnent alors des ressources pour un montant équivalent aux ressources des lignes et des colonnes une fois ces dernières remplies. Evidemment tout le sel du jeu tient dans ce simple choix cornélien : quand allez-vous poser vos châteaux sachant que vous n’en avez qu’un nombre limité et ce pour les trois manches du jeu ? Allez-vous les poser au tout début sachant que les cases alentour sont vides et que vous pourrez poser tout à loisir des tuiles de gains d’or mais que l’adversaire pourra vous inonder de tuiles de malus d’or ? Ou bien allez-vous attendre la fin de la partie en étant sûr de gagner de l’or mais en prenant le risque de voir l’adversaire rafler la mise à votre place à tout instant ?


Les tuiles spéciales

...Mais avec beaucoup de richesse stratégique

Alors évidemment, Reiner Knizia, en maître incontesté de ce genre de jeu (auteur de quelques perles comme Tigre et Euphrate, Camelot ou bien encore Korsar), a ajouté quelques subtilités au jeu pour le rendre encore plus savoureux et stratégique. Ainsi, vous possédez quatre types de châteaux différents, chacun ayant un rang (entre un et quatre). Ce rang servira de multiplicateur lors du décompte des quantités d’or. Attention donc à ne pas avoir de château de rang trois ou quatre sur une ligne ou une colonne négative car l’addition (négative) peut vite grimper. Et vous ne pourrez pas forcément vous refaire car seuls les châteaux de rang un sont en nombre illimités. A cela ajoutez quatre types de tuiles qui ont des effets différents. La « Montagne » divise sa rangée et sa colonne en deux parties, chacune d’entre elles étant comptée séparément. La « Mine d’or » double la valeur de toutes les autres tuiles (positives ou négatives) dans sa rangée ou colonne. Le « Sorcier » augmente de un le rang de chaque château adjacent. Et enfin le « Dragon » annule toutes les tuiles positives d’or, ne laissant que les tuiles de malus lors du décompte. Enfin, histoire de pimenter encore un peu plus le jeu, en début de manche, vous piochez une tuile parmi la pile que vous garderez secrète et que vous pourrez jouer quand vous voudrez : de quoi réserver bien des coups bas à votre adversaire.

Face de Troll !


Lui, il va vous faire perdre beaucoup de pièces
avec son air pas content

Car de vacheries, il en est bien question dans Kingdoms. Ou plutôt d’opportunisme devrais-je dire. Vous serez en effet toujours partagés sur la pose de vos tuiles. Positives ou négatives, il sera souvent difficile de trouver un emplacement idéal pour vos châteaux qui vous affecte positivement mais pas l’adversaire et inversement. Après si l’on rentre dans le cycle infernal de la vengeance, les parties peuvent rapidement ressembler à ceci :

Ryo : « Tu m’as pourri avec ton Troll au tour d’avant et du coup je vais perdre 24 pièces d’or avec mon château rang 3. Tiens manges-toi mes loups affamés ! ».

Maat : « Oh l’autre eh : la mine d’or du tour d’avant t’avait rapporté 46 pièces, il faut bien équilibrer un peu. Et puisque tu le prends comme ça, et ben je vais m’allier avec Islara».

Islara : « Ça c’est gentil, mais tu m’a quand même mis un Dragon dans la figure au tout début et c’est toi qui a le plus d’or. Je vais plutôt m’allier avec Ryo pour te faire plonger ! »

Etc… (Avec quelques noms d’oiseaux en plus)


Les châteaux en plastique

Interaction entre les joueurs

Ah ça question pourrir ses adversaires, ce jeu est une merveille. Quelle joie de poser une grosse tuile de malus à un adversaire qui se voyait déjà amasser beaucoup d’argent et qui au final en perd ! Le jeu est jouissif de ce point de vu là. Tout comme il peut sembler très injuste quand c’est l’adversaire qui nous fait des crasses. Mais c’est ça qui est formidable dans ce jeu : c’est l’interaction entre les joueurs. Encore une fois, on est loin d’un ameritrash ou l’on attend patiemment son tour de jeu et où l’on regarde à peine ce que font ses coéquipiers/adversaires. Kingdoms est un jeu ou il faut en permanence comprendre ce que fait l’adversaire (ou essaye de faire à moyen terme) et le contrer, tout en s'adaptant pendant toute la durée du jeu au tirage des tuiles. De ce point de vu d’ailleurs Kingdoms fait un peu penser aux Echecs car il oblige le joueur à continuellement revoir sa stratégie et à s’adapter au jeu de l’adversaire car ici les scores sont continuellement en mouvement et changent à chaque tour de jeu. Et si par hasard vous trouvez que l’aspect "pioche de tuiles" laisse trop de part au hasard, pas de problème. Essayez donc de jouer avec la variante où l’on place toutes les tuiles faces visibles au début du jeu. Les joueurs peuvent alors choisir librement leurs tuiles à n’importe quel moment du jeu. Mais là attention : ça devient du grand art et votre cerveau risque la surchauffe rapidement tant vous entreverrez de possibilités et aurez de choix à faire (qui plus est à trois ou quatre joueurs).

Gratte-papier


Quelques autres éléments de jeu
Alors pour le principe on pourrait lui faire deux petits reproches (mais c’est vraiment histoire de dire quelque chose !). Le premier c’est le peu de tuiles d’actions spéciales : seulement quatre. Même si elles apportent chacune leurs avantages, on aurait aimé en avoir trois ou quatre de plus histoire de pouvoir faire encore plus de coups fourrés. Le deuxième reproche tiens au fait qu’on est obligé de jouer à Kingdoms en permanence avec un papier et un crayon pour pouvoir additionner les colonnes et les lignes et faire les totaux de chacune des manches. Il aurait été agréable d’avoir un système de comptage pour s’épargner ce travail (un peu) fastidieux. Et du coup les jetons de pièces d’or ne servent quasiment pas puisqu’on est toujours obligé de recalculer le total à la fin d‘une manche.

Mais ces deux très légers défauts ne viennent absolument pas ternir le génie de ce jeu qu’est Kingdoms. Il prouve une nouvelle fois qu’un concept simple, mais bien exploité peut faire des merveilles. Car au final Kingdoms est un jeu de placement rapide, accessible, épuré et d’une efficacité redoutable. Mais il est également d’une réelle profondeur et d’une très grande richesse, et qui plus est très bien équilibré. Et c’est sûrement pour toutes ces raisons qu’il s’avère si addictif. On a envie de faire des revanches en permanence, de le faire découvrir à ses amis et d’enchaîner les parties à un rythme frénétique. Bref du grand Knizia (même s’il s’est auto-pompé et que le jeu est une édition relifté de la version de 2002) qu'on ne peut que vous conseiller d'acheter !