Horreur à Arkham
Jeux de société / Critique - écrit par Islara, le 06/11/2006 (Tags : arkham horreur campagne jce cartes scenario stock
Arkham a tout d'une ville ordinaire. Elle a son commissariat, son centre scientifique, son église, ses boutiques, son hôpital, sa banque, son cimetière, ses rues diverses et variées, son député, ses Professeurs émérites etc... Mais voilà, il se passe des choses étranges à Arkham et parfois on y croise des monstres hideux sortis d'un univers de cauchemars. Ceux qui disent les avoir vus sont-ils fous ou ces apparitions sont-elles bien réelles ? Un peu des deux, car une fois qu'on a vu une de ces bêtes démoniaques, on ne reste pas indemne.
Quelques habitants, plus ou moins ordinaires, plus ou moins intelligents, plus ou moins coriaces, motivés chacun par leurs propres intérêts, ne restent pas indifférents aux rumeurs et à ces faits divers étranges. Ils décident de comprendre, de lever le voile du mensonge et de faire éclater la vérité.
Et heureusement pour Arkham qu'ils aient fait ce choix. Mais ces habitants devenus investigateurs le paieront au prix fort, car les voilà maintenant chargés de sauver Arkham d'une terrible malédiction, de fermer les portails reliant la ville à des univers de folie où seuls les plus résistants peuvent survivre à peine quelques heures.
Mais une vidéo digne de ce nom vaut mieux que toutes les descriptions.
Tel est le principe et l'univers glauque d'Horreur à Arham, inspiré du monde de Cthulhu. Incarnant un personnage parmi les 16 disponibles et tiré au hasard, vous devez parcourir la ville à la recherche d'indice, d'armes et de sorts, tuer les monstres qui l'envahissent petit à petit et sauver la cité en fermant tous les portails (ou en en scellant au moins 6 ou, à défaut, en tuant le monstre ultra-puissant, bref le boss, qui déboule sur Arkham en fin de partie).
Les cartesD'une richesse infinie, Horreur à Arham est une réédition extrêmement améliorée du Horreur à Arkham sorti en 1987 chez Jeux Descartes (Richard Launius était d'ailleurs déjà le concepteur de ce premier volet). Si les investigateurs, les monstres et le but du jeu sont à peu près les mêmes, les règles, les armes et sorts à disposition ont été notablement étoffés. Les accessoires de jeu (plateau, cartes, jetons) sont aussi nettement plus beaux, esthétiques et soignés, au point que l'on a presque envie de mettre les cartes sous pochettes pour les protéger.
Principe coopératif
Une des premières particularités de ce jeu, suffisamment rare pour qu'on la remarque, ne serait-ce que par son originalité, réside dans la coopération entre les joueurs.
Les joueurs ne sont pas adversaires, ils sont partenaires. L'adversaire c'est... le plateau, les figurines, les cartes etc...
Donc, pas de souci si votre frère, soeur, ami, épouse est très mauvais joueur, vous ne jouez pas contre lui, vous jouez avec lui.
Au-delà de cet aspect pratique assez secondaire, ce principe coopératif a surtout l'avantage de créer une convivialité proche de celle du jeu de rôle (d'autant qu'il y a des jets de dé, mais de 6 uniquement, soupirs...). On a ainsi un peu le sentiment d'être dans une compagnie d'aventuriers, solidaires les uns des autres, accomplissant une quête pour sauver le monde (tadam). Et même si vous mourez, ce n'est pas grave, les règles prévoient que vous prenez immédiatement un autre investigateur.
A plusieurs, le goût de la victoire sera toujours plus savoureux et la défaite toujours moins amère.
Richesse
Horreur à Arham n'a pas lésiné sur la quantité et la variété, c'est le moins que l'on puisse dire. Avant d'avoir acquis ne serait-ce qu'une fois chaque sort, chaque arme, chaque capacité spéciale, chaque objet rare, d'avoir vu se réaliser tous les évènements (classés en 3 catégories de sous-évènements, chaque catégorie contenant entre 50 et 70 cartes), d'avoir incarné au moins une fois chaque investigateur (au nombre de 16 et aux caractéristiques plus que diverses) et d'avoir combattu chacun des 8 boss, autant dire qu'il faudra... des mois, voire des années de jeu.
De plus, le jeu est conçu pour que l'on puisse jouer de 1 à 8, la stratégie et la tactique changeant alors complètement selon le cas.
Oui, Horreur à Arham a l'immense mérite d'avoir créé dans cet univers fantastique une complexité et une variété telles que le jeu s'en trouve vraiment de grande qualité et, à supposer que le genre plaise, avoir une durée de vie presque infinie.
On a en contrepartie l'ingrate obligation de se plonger dans un manuel de règles de 24 pages (gloups) et il faut compter deux voire trois bonnes parties pour bien s'en imprégner (surtout si on a la version anglaise). Malgré tout, ce prix à payer apparaît largement compensé par cette immense richesse et donc le plaisir de jeu qui en résulte.
Et en prime, il y a quelques adaptations et variantes de règles disponibles sur http://www.fantasyflightgames.com/boardandcard.html
Equilibre
Dernière atout d'Horreur à Arham : l'équilibre.
Une des investigatricesD'une, selon le nombre de joueurs, les règles ont prévu des ajustements subtils, dans les conditions de victoire au combat final, la quantité d'apparition de monstres et quelques autres petites choses. Ces ajustements sont opportuns et l'on louera ce sens du détail perfectionniste pour que le jeu soit le plus équilibré possible.
De deux, le dosage de la difficulté est plutôt bon : la victoire n'est ni trop facile ni trop dure. Les rebondissements et retournements de situation sont même assez courants, selon les cartes d'évènements que l'on tire ou les jets de dés que l'on fait, ce qui ne fait qu'ajouter à l'intensité du jeu que l'on savoure pleinement à coup de sueurs froides. Tout peut vraiment arriver, du maudit coup de poisse très critique au vrai coup de bol miraculeux. Tip top.
Une cadence trop intense ?
Les portails apparaissent à vitesse grand V dans Arkham (un par tour), alors qu'il en faut 2 pour les fermer... Et en plus, au bout de 10-14 tours, le boss arrive. Le joueur a un peu le sentiment que tout cela va trop vite, qu'il n'a pas le temps d'explorer la ville à la recherche d'objets, armes etc... Bref, le joueur a un peu trop de pression.
Ouh le vilain monstre !Alors, défaut ou qualité ? Ce sentiment était également présent dans la dernière version. L'on peut penser que cela est volontaire de la part des concepteurs pour recréer l'ambiance oppressante de Cthulhu et l'on peut dire que c'est plutôt réussi. Cette caractéristique pourra porter un peu préjudice au jeu, mais dans l'ensemble, cela peut être largement atténué avec un peu d'organisation et de stratégie et c'est bien compensé par le bon dosage de la difficulté et la richesse du jeu.
Cette adaptation très bien réussie sur plateau de l'univers de Cthulhu et du roman de Lovecraft, rehaussée en prime par l'excellent graphisme des accessoires, vous fera frémir plus d'une fois et reviendra sur votre table de jeu régulièrement, même des années après votre acquisition.
Conseil : éviter d'y jouer le soir en cas de prédisposition aux insomnies. Hi hi